Dans la chasse aux dépenses publiques, la rupture conventionnelle (RC), entre employeur et salarié lors d'un contrat à durée indéterminée (CDI), est ciblée.
Son succès, depuis sa création en 2008, fait peser 10 milliards d'euros d'allocations-chômage associées, soit un quart des financements de l'assurance chômage. D'où le souhait du gourvernement de relever de 30 à 40% le taux de contribution patronale sur les indemnités des ruptures conventionnelles.
Il sera débattu dans le PLFFS, le projet de budget de la Sécurité sociale.
Il est vrai que la rupture conventionnelle a rendu le recours au CDI plus flexible en facilitant sa rupture, tout en garantissant une protection de l'emploi aux salariés, avec une ouverture aux droits au chômage.
Plus de 500 000 ruptures conventionnelles ont été conclues en 2024. La même année, 1,85 millions de démissions de CDI ont eu lieu.
Ce poids pour les finances publiques a motivé la dernière étude de l'Institut des politiques publiques, l'IPP, qui s'intéresse à un angle précis : le dispositif a-t-il facilité les séparations à l'amiable, sans démission, plutôt que des licenciements pour motifs personnels (basés sur une raison liée à la personnalité du salarié : faute du salarié, insuffisance professionnelle, inaptitude déclarée par le médecin du travail...) ?
L'IPP s'est basée sur le travail académique de deux chercheurs, Pauline CARRY, professeure à l'université de Princeton, et Benjamin SCHOEFER, professeur à l'université de Berkeley.
Peu de licenciements déguisés
Leurs travaux sur le périmètre français démontrent que la mise en place de la rupture conventionnelle n'a entraîné qu'une substitution limitée aux licenciements : seuls 12 % d'entre eux sont convertis en ruptures conventionnelles.
"Cette faible conversion s'explique en grande partie par l'existence de conflits entre employeurs et salariés au moment de la séparation."
En effet, le nombre de cas de contestation de licenciement pour motif personnel portés aux prud'hommes n'a pas diminué, passant de 120 000 cas par an entre 2003 et 2006, à 130 000 entre 2012 et 2014.
Les chercheurs sont allés interroger des directeurs de ressources humaines pour mieux comprendre ce faible taux. Il en ressort trois motifs :
- L'hostilité entre employeur et employé,
- L'utilisation du licenciement comme outil disciplinaire vis-à-vis des autres employés,
- Les divergences de point de vue sur l'issue probable aux prud'homme.
Davantage de démissions converties
En parallèle, les tavaux de l'étude démontrent qu'une part non-négligeable (40 %) de démissions à été convertie en ruptures conventionnelles, malgré leur coût supérieur pour l'employeur. Ouvrant alors un droit à l'assurance chômage et entraînant la fatale hausse des dépenses publiques.
"En théorie, l'obligation de verser une indemnité de rupture dans le cas d'une rupture conventionnelle, inexistante lors d'une démission, devrait empêcher le remplacement des démissions, mais les substitutions observées indiquent cependant que le salarié parvient à compenser l'employeur pour cette indemnité. Les résultats montrent qu'à la suite d'une RC, la plupart des salariés restent pus longtemps que le mois de préavis obligatoire, et que cette prolongation est associée à une indemnité plus élevée."
D'où le souhait du gouvernement de relever de 30 à 40 % le taux de contribution patronale sur ces RC.